• - Tribune libre de Richard, Cybersmile

    Traduction de la tribune écrite par Richard pour Cybersmile

    (11 Juin 2015)

     

    Article original à lire ici

    Photos crédits ©Richard Armitage' selfie & photos article Cybersmile

     

    Traduction par Jolie Pensée

     

    La Condition Humaine et les Médias Sociaux

     

    Nous sommes ravis de vous donner un aperçu exclusif des réflexions de l'ambassadeur officiel de Cybersmile, Richard Armitage, sur les médias sociaux utilisés dans notre société toujours plus numérique. Richard est un brillant acteur anglais plus connu internationalement pour son interprétation de Thorin dans la trilogie du 'Hobbit'. Dans cet examen passionné et honnête sur les communautés numériques, il parle de ses propres expériences à surmonter le harcèlement et de l'impact durable que cela peut avoir sur une personne. 

     

    « Et c'est là qu'est le hic », parce que quelle que soit la manière prudente et claire avec laquelle je vais tenter de faire ma première tribune libre sur un sujet inquiétant pour Cybersmile, tout n'est pas noir et blanc. 

    Donc si je n’ai rien qui mérite d’être dit, devrais-je parler ? "

    " Je ne dirai que de belles choses ? "

    " Je ne suis pas autorisé à critiquer sinon je ne suis plus ‘suivi’ ? " 

    La réponse à mon humble avis (et croyez-moi c’est humble de le partager quand on arrive à 43 ans) est en fait quelque chose qui s’applique à mon travail en tant qu’acteur. C’est pourquoi, parfois les acteurs sont appelés à travailler avec des thérapeutes, dans de grandes entreprises, dans des écoles. C’est pourquoi, la thérapie par le théâtre est fantastique pour comprendre ce que nous faisons, comment nous le faisons et quel pourrait en être le résultat, et dans une improvisation, quand nous ne jouons pas notre propre rôle, parfois nous explorons des sentiers qui sont trop terrifiants et inacceptables dans nos vraies vies.

    D'une certaine façon, les médias sociaux sont un peu une réplique de cela, jetez juste un oeil au brillant documentaire “Catfish” (1) d’Henry Joost et Ariel Schulmann. C’est une vue en miniature de ce qui est en train de se passer, à un moindre degré, partout dans les médias sociaux. Une sorte de monde fantaisie, une réinvention du soi, si le « soi-même » est insatisfait ou malheureux avec son soi. J’ai récemment utilisé un hashtag, #findyourvoice. C’est un peu ringard, je crois, mais je pense que chacun fait ça pour s’étendre sur la toile. Alors qu’il y a 20 ans, nous avions recours aux journalistes, aux éditorialistes, aux journaux pour nous indiquer les choix, maintenant tout le monde peut parler. Ne pensez pas que ce soit une chose merveilleuse. Tout peut maintenant faire l'objet d'un forum de débat, de discussion. Les communautés d'amis peuvent se regrouper et se trouver et nous oublions comme cela peut être difficile pour de nombreuses personnes. Les personnes qui trouvent difficile de se sociabiliser, qui ne sont pas mobiles, qui sont seules.

    Le revers de la médaille est l'activité politique et sociopolitique, de nos jours, on ne peut plus se fier à ' la ligne directrice ', on peut se mettre en quête de la vérité nous-mêmes. J'ai en tête l'image des foyers texans qui font une vente collective dans leur jardin (ou pour ceux de l'autre côté de l'Atlantique, dans les îles Britanniques, une Jumble Sale) (2), trouver quelque chose de valeur est difficile, une chasse au trésor. Une autre métaphore (parce que j'aime la musique) chaque personne en Chine (parce qu'ils sont très nombreux) en train de jouer d'un instrument de musique en même temps, quelque part au milieu de tout cela il y a le " Spiegel im Spiegel " d'Arvo Part (3) (allez-voir sur Spotify, c'est vraiment beau), comment je peux l'entendre ? Surtout quand je ne peux même pas garantir que les instruments sont ceux qu'on dit qu'ils sont, et que ceux qui en jouent ne sont pas ceux qu'ils m'ont dit qu'ils étaient... Et même, comment savez-vous que c'est moi, Richard Armitage ?

    Nous ne pouvons pas détecter. Nous ne pouvons pas contrôler, nous ne pouvons pas modérer et de plus, nous ne le devrions probablement pas.

    Liberté de parler, liberté d'écouter quiconque nous souhaitons. 

    Je crois que nous devrions montrer nos visages et utiliser nos vrais noms quand nous sommes en ligne, c'est juste une préférence personnelle.

    Pour en revenir au premier point, “la société des médias sociaux” dans laquelle nous aimerions tous nous sentir en sécurité, encouragés, excités, créatifs, spontanés, novateurs, courageux, est vraiment entre nos mains. Pour en revenir au métier d’acteur, ça m'a pris longtemps pour me débarrasser des effets du harcèlement à l'école. Ces gens riaient toujours dans mon dos. Je les regardais toujours du coin de l'oeil, j'ai maintenant une incroyable vision périphérique très utile (comme un sens kinesthésique, allez voir ça sur Google), mais essayez d'être un acteur courageux, expérimenté et extraverti avec tous ces complexes. Ça ne s'est pas produit... 

    Il est là le truc, et c'est la clé de mon travail et, je pense, la nôtre en tant que communauté. Quand nous parlons ou écrivons, finalement nous désirons “toucher”. Si nous ne regardons pas la destination de cette émotion alors comment savons-nous si nos mots ont atteint leur but et l'effet qu'ils ont causé ? C'est facile de visu, les 43 muscles du visage de la personne peuvent nous donner un million de réponses à cette question. Mais en ligne... comment ? C'est habituellement dans la réponse qui est écrite en retour, mais bon sang, les interprétations erronées qui peuvent se produire quand on s'exprime succinctement et expressément !

    Là encore, les motivations sont mises en doute, on spécule sur des intentions cachées, le subconscient... Bon, laissons cela aux psychologues.

    Il ne faut pas trop censurer et oui, nous devons dire ce que nous pensons, dire la vérité, mais nous devons aussi “regarder la destination de nos mots” et comprendre “le carburant qui les propulse”. Ça pourrait être la colère, ça pourrait être la haine. Parfois, c'est la provocation, le sarcasme, l'humour. Parfois, c'est juste pour contrarier ce que dit l'autre. Arrêtez et réfléchissez avant d'appuyer sur envoyer.

    Relisez ce que vous écrivez, je le fais à chaque fois. J'annule plus que je n'envoie (je retire ce pour quoi j'ai changé d'avis). Si j'ai un avis très dur sur quelque chose que j'ai envie de dire, je me fais violence pour revenir à l'origine du “pourquoi je ressens cela ?”

    C'est encore une part de mon travail de créer un personnage crédible et finalement de créer un moi crédible en-dehors de mon travail. Juste... “parce que c'est ce que je ressens”, c'est un peu une bonne excuse. Reformons des groupes de discussion à l'école !!! 

    Je vais avoir l'air moralisateur (je ne suis pas un prédicateur), mais nous avons une langue incroyable et maintenant avec cette chose électronique dans ma main, je vais pouvoir chercher les mots qui traduisent vraiment ce que je sens ou pense. J'encourage tout le monde à faire de même. Et vous découvrirez comment “on se promene” en ligne.

    Et même quand j'écris ceci, je sais qu'il y en aura toujours qui diront “non, j'ai le droit de parler de ce que j'aime, comment je l'aime et à qui j'ai envie, j'ai le droit d'être un harceleur si j'en ai envie” et je dis “fais ton truc”, quand il y a quelque chose à la télé que je n'aime pas, je change de chaîne ou j'éteins. Faites pareil avec les médias sociaux: block et mute (bloquer/muet)...

    Dans une rue bondée, la plupart du temps, on a l'air de naviguer sans se rentrer les uns dans les autres, et globalement, il n'y a pas de bagarre tous les 10 mètres... Alors pourquoi le faire en ligne ?


    Tout comme le harcèlement, c'est comme le moment où la casserole déborde, ou c'est un air empoisonné qu'on ne peut pas purifier, alors pourquoi ennuyer les gens ? Je pense que l'art est fait pour ça. Je peux soutenir le meilleur et le pire de nous-mêmes. On peut “attaquer” une toile avec une peinture noire sous l'effet de la colère, on peut s'en prendre à un clavier de piano, on peut danser jusqu'à tomber, on peut lire un livre sur une société puritaine qui exécute ses aînés, on peut explorer la psychologie d'un tueur en série et quand on ne peut pas le faire soi-même, on peut l'expérimenter ou en être témoin à travers les autres.

    C'est plus que d'être gentil. " Le cri " d'Edward Munch est loin d'être charmant. " Saturne dévorant son fils " de Goya est horrible, Metallica, Die Antwoord (4) etc. Et puis il y a Monet, Fauré (5), Renée Fleming (6), Peter Jackson, Ariana Grande (7) (OK c'est très éclectique, je l'admets)...

    Mais quand nous regardons, nous écoutons et nous identifions, nous sommes à l'écoute de la condition humaine.

    Nous formons tous la condition humaine, qu'on aime ou non. Médias sociaux. Expression. La Condition Humaine.

     

    Notes de la traductrice 

    (1) " Catfish " est un film documentaire de 2010 : Nev Schulman s'est fait filmer par ses amis en train de nouer une relation via les réseaux sociaux. Une vive polémique a suivi la sortie de ce film aux Etats-Unis, car de nombreuses personnes ont accusé les réalisateurs d'avoir monté un faux film documentaire, ce dont ils se défendent fermement. Des suites de ce film est née une émission diffusée sur MTV Catfish : fausse identité, visant à aider les personnes qui sont victimes d'abus en tout genre sur les réseaux sociaux.

    (2) Aux Etats-Unis, les habitants d'un même quartier organisent régulièrement des brocantes de particulier à particulier, chaque foyer installe son étale devant sa maison dans son jardin. Au Royaume Uni, on parle de Jumble sales, ce sont des sortes de braderies où l'on peut acheter des produits de seconde main moyennant une petite participation pour financer l'organisation.

    (3) " Spiegel im Spiegel " (Le miroir dans le miroir) est une œuvre pour piano et violon (ou/et violoncelle) du compositeur estonien Arvo Pärt écrite en 1978. Ecoutez: https://www.youtube.com/Arvo Pärt

    (4) Die Antwoord est un groupe sud-africain issu du mouvement zef aux paroles plutôt trash et argot afrikaner. Deux des trois membres ont joué dans le film " Chappie " avec Hugh Jackmann et Sigourney Weaver.

    (5) Gabriel Fauré (1845-1924) était un pianiste, organiste et compositeur français. Ecoutez: https://www.youtube.com/Gabriel Fauré

    (6) Renée Fleming est une soprano américaine née en 1959. Ecoutez: https://www.youtube.com/Renée Fleming 

    (7) Ariana Grande est une actrice, auteur-compositrice-interprète américaine née en 1993. Ecoutez: https://www.youtube.com/Ariana Grande 

    Partager via Gmail

  • Commentaires

    1
    Thorin II
    Mardi 23 Juin 2015 à 15:55

    Là où je ne suis pas tout à fait d'accord, c'est lorsqu'il dit d'utiliser le vrai visage et le vrai nom. Je pense que cela peut être un danger pour nos enfants. Sinon, il a raison, réfléchissons avant de dire quelque chose....

    2
    Jolie pensée
    Jeudi 25 Juin 2015 à 14:59

    Oui Thorin II, tu as raison, sauf qu'on se retrouve dans la situation où l'on ne sait pas à qui on s'adresse: à un homme, à une femme, à un ado? On ne saurait pas comment adapter son discours. Il faudrait un système où l'on connait au moins l'âge et le sexe de la personne. Après, le physique, c'est secondaire (en tout cas pour des débats d'idées). Malheureusement, on ne peut pas empêcher les c.. d'être partout sur la toile. En tout cas, on voit bien l'intérêt pour les parents de mettre un contrôle sur l'ordinateur. En fait, le mieux, c'est de ne pas trop se mouiller, ne pas se compromettre sur Internet, n'accepter comme amis que les personnes dont on est sûr et privilégier les relations avec les vraies personnes, une vraie vie sociale en somme, et pourquoi pas rencontrer physiquement les personnes avec lesquelles on tisse des relations sympa en ligne. J'en ai fait l'expérience et c'est super! (les personnes concernées se reconnaîtront happy)

    3
    Jeudi 25 Juin 2015 à 16:57
    April73

    Merci pour la traduction les filles. happy

    Jolie Pensée, je plussoie totalement sur les rencontres avec les personnes avec qui on a noué des relations en ligne. C'est super et cela débouche sur de très belles rencontres. smile

    4
    Thorin
    Vendredi 26 Juin 2015 à 11:21

    D'accord avec vous deux. Mais donner le sexe et l'âge de la personne peut aussi être dangereux pour nos enfants. Comme vous le soulignez on ne sait qui est derrière les mots, et certaines personnes sont très dangereuse pour les enfants et ados (hélas).


    Après, on peut quand même, en regardant la façon dont sont tournées les phrases, deviner si c'est un ado ou un adulte qui nous parle (je vois comment parle les ados avec ma fille......). Moi, j'ai résolu (enfin j'espère) le problème : le compte twitter est accessible à nous deux, et donc je vois tous ses messages.


    Bon week end

    5
    Samedi 4 Juillet 2015 à 16:42

    Merci pour la traduction de ces paroles sages. La liberté d'expression veut que, nous avons le choix conscient d'utiliser soit un pseudo, ou soit son vrai nom (en sachant qu'il peut y avoir des homonymes aussi), et, oui ou non sa vraie photo sur les réseaux sociaux. Je partage vos avis concernant le fait que l'on ne peut pas empêcher les personnes désagréables et mal intentionnées d'être partout sur la toile. Le mieux est de les ignorer, et de les bloquer directement, sans entrer dans quelconque conflit inutile. Mieux vaut être et rester des pionniers et pionnières du silence. Les parents sont et doivent rester avant tout Responsables de leurs enfants et adolescents concernant entre autres les réseaux sociaux. Après, il existe aussi des adultes qui peuvent se trouver en périodes fragiles psychologiquement, et qui peuvent également être l'objet d'intimidations. Personne n'est donc pas toujours à l'abri de ce type de comportement. D'accord avec vous, il est important de ne pas se compromettre ni d'accepter n'importe qui dans ses contacts/ ami(e)s, et de plutôt privilégier les relations sincères avec les bonnes personnes.

    Rencontrer en vrai d'autres personnes avec lesquelles on a tissé des liens positifs en ligne, je partage également vos idées à ce sujet. J'ai déjà eu l'occasion de le faire dans le cadre de la musique, cela m'a permis de créer quelques amitiés durables dans le temps. smile

    Bon week-end ensoleillé et chaud.

     

    6
    béatrice
    Vendredi 16 Mars 2018 à 16:25

    Je comprend enfin votre regard , j'ai connu celà a l'école aussi pour les mêmes raison "le dos" les moqueries, les insultes, les attaques, le pire c'est que ma propre sœur était dans le lot , et pour proteger mon dos j'ai aussi developpée cette vision périphérique, j'ai aussi les yeux bleu comme vous avec un mélange de soupçon, ce qui fait reculer d'un pas certaines personnes !  et vraiment tout ce que vous dites ci-dessus est tellement vrai, qui fait que maintenant je vous apprecierai  encore plus . votre travail est excellent  merci  vous êtes un acteur entier je veux dire par là que vous acceptez toutes sorte de rôles , bon ou mauvais  bravo !  ciao guapo                                                                                           



    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :